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Politique familiale

Face aux discours apocalyptiques et aux contre-vérités : garder raison, le CNAFAL communique !

  • 23 octobre 2014 |
  • allocations familiales - CNAFAL - familialiste - politique familiale
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Fiscalisation et modulation des allocations familiales : quelle tartufferie ! La vrai question qui nous est posée, depuis 4 décennies, au sujet de la politique familiale c’est : Y a t-il de la justice sociale et est-elle discriminante à l’égard des familles les plus pauvres ?

1.     Sur l’universalité des allocations familiales :

Dès l’origine « l’allocation de salaire unique », ancêtre des allocations familiales est réservée aux femmes au foyer et est résolument nataliste et progressive en fonction du nombre d’enfants.  Elle est réservée aux familles résidentes dans les communes de plus de 2000 habitants ! On estime, à cette époque, que dans les communes rurales, le travail de la femme se déroule le plus souvent dans le cadre domestique et est donc compatible avec la garde des enfants ! C’est ainsi que les femmes d’agriculteurs, les femmes de travailleurs indépendants et les femmes de chômeurs en sont exclues.

En 1945, le code de la famille privilégie un modèle familial : la famille de trois enfants et plus et la mère au foyer.

Il est à noter d’ailleurs, que la CGT et la CFT-FO, dès 1947 souhaitent l’extension des allocations à toutes les familles, que les mères travaillent ou pas !

Pierre Mendès France, lui-même est sur cette position en considérant qu’il n’est pas bon d’encourager les femmes à ne pas travailler. Mais les organisations familiales et l’UNAF, fortement dominées par le catholicisme, considèrent au contraire, que c’est la pierre angulaire de toute politique familiale. On retrouvera cette constante tout au long des décennies écoulées, y compris entre 2007 et 2012, où à l’AG de Nancy (2011), une partie de l’AG de l’UNAF en présence de Thomas PICKETTY, conférencier invité, complètement abasourdi, réclame la mise en place du « salaire maternel » ! C’est sous la présidence de Sarkozy que certains considèrent que le décrochage scolaire et l’accroissement de plus en plus précoce de la délinquance juvénile sont dus au fait que les femmes ne restent plus au foyer pour élever leurs enfants ! Idéologie familialiste, quand tu nous tiens !

Il faudra la loi du 6 août 1955, pour faire bénéficier les femmes d’agriculteurs de l’allocation de salaire unique et la loi du 11 décembre 1956 pour que les femmes de travailleurs indépendants en bénéficient…

On le voit, dès le départ, la politique familiale est conservatrice, figeant un modèle familial qui se situe à l’opposé des droits de la femme (égalité totale) et des droits de l’enfant (on en subi encore les conséquences), au niveau de la protection maternelle et infantile, quand malgré des faits de maltraitance avérés, on continue à laisser au foyer des enfants sous prétexte de ne pas couper le lien avec la mère, comme si ce n’était pas la violence qui le coupait !

Il faut attendre la décennie des années 1970, pour que l’émancipation féminine soit actée dans toute une série de lois, prenant acte des revendications issues de mai 1968. Ce n’est pas un hasard, si Nicolas Sarkozy, lançant sa campagne présidentielle en mars 2007, à Montpellier en faisant une longue critique radicale de 1968 et fait appel aux ressorts les plus passéistes et patriarcaux de l’électorat. Éric Zemmour vient de reprendre cette antienne dans la lignée de ses idées contre-révolutionnaires…

Naturellement les laïques, depuis très longtemps, n’ont jamais considéré la famille comme une catégorie à part. La Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen s’adresse à l’individu, tout comme la Déclaration des Droits de la Femme d’Olympe de Gouges.

C’est d’ailleurs dans les années 1970, plus exactement en 1972, que le système de l’allocation de salaire unique est cassé et que des allocations sont mises sous conditions de ressources.

D’une certaine manière, l’entrée massive des femmes sur le marché du travail, l’allongement de la scolarité, l’accès massif des filles aux études, y compris supérieures, changent la donne. C’est une révolution culturelle, mal acceptée d’ailleurs par les conservateurs et les familialistes de l’époque. Par le travail, les femmes gagnent une insertion sociale et une reconnaissance autre que par l’intermédiaire de leur mari et leur procure une indépendance matérielle. Dès lors, l’architecture de la politique familiale devient de plus en plus anachronique, dépassée, synonyme d’une véritable servitude de la femme au foyer « bonne pondeuse » et bonne épouse de Monsieur Gagne-Pain !

En revanche, le QF (Quotient Familial) a été créé par la loi des finances du 31 décembre 1945. Il répond véritablement à un souci de justice distributive. Il s’agit bien de rendre l’impôt sur le revenu aussi neutre que possible en fonction des charges de chaque ménage avec enfants. C’est la solidarité horizontale, à laquelle le CNAFAL souscrit sans réserve.

Dès 1975, les allocations familiales sont généralisées, que l’on ait un travail salarié ou pas (initiative de Simone Weil). Seul inconvénient, le premier enfant est ignoré. Mais il l’était dès 1945, puisque l’option de la politique familiale est purement nataliste. On ne peut pas parler d’universalité, alors que le premier enfant est ignoré.

Aussi François Mitterrand, candidat à la Présidence de la République en 1980 annonce la création d’une allocation familiale dès le 1er enfant, conforme aux positions laïques, tout comme il n’a pas hésité à proposer d’abord de plafonner le quotient familial et le quotient conjugal, première étape vers la fiscalisation des allocations familiales et la suppression définitive des deux quotients. La crise économique et financière de 1983 l’en empêcheront.

Alors s’amorce, et le débat  dure depuis 35 ans, de savoir quelle politique familiale mettre en œuvre et qui soit égalitaire : le constat abrupt c’est que les prestations familiales finalement sont destinées aux familles modestes et le quotient familial pour les familles aisées !

C’est la raison pour laquelle le CNAFAL avance la création « d’un salaire social à l’enfant » pour tous, ayant vocation à devenir un revenu social garanti ; tout comme dans les débats autour du QF et du quotient conjugal, le CNAFAL avance l’idée d’un crédit d’impôt forfaitaire pour toutes les familles et égal pour chaque enfant que l’on paye l’impôt sur le revenu ou pas.

2.     Sur la fondation de la Sécurité sociale

Les familialistes instrumentalisent le fondateur de la Sécurité sociale, Pierre Laroque, devenu l’icône derrière laquelle on s’abrite pour distinguer politique sociale et politique familiale.

Le CNAFAL ne partage pas cette vision.

Pour Pierre Laroque, la Sécurité sociale « est un élément dans la construction d’un ordre social nouveau où serait éliminée l’inégalité dans la sécurité, l’un des facteurs essentiels des distinctions entre classes sociales ».

Pour les fondateurs et le Général de Gaulle en particulier, il s’agissait de créer une véritable cohésion sociale, par la participation de tous au financement de la Sécurité sociale et en particulier du patronat (d’où la cotisation sociale d’un montant de 16,5% de la part du patronat sur la branche famille, réduite aujourd’hui à 5,35%, avant de disparaître en 2017, ce que le CNAFAL n’accepte pas !

Le Général de Gaulle considérait que vu l’attitude du patronat dans les années 1930 et sous Vichy, il y avait lieu de les impliquer au progrès social du pays par une redistribution réglementaire, salaire différé !

Ce que les conservateurs d’aujourd’hui oublient, c’est que la Sécurité sociale avait pour objectif de lutter contre les terribles inégalités sociales qui ont conduit la France et d’autres pays européens à se tourner vers les solutions fascistes…

De nos jours, peut-on masquer les terribles inégalités qui touchent les familles ? 2,5 millions d’entre elles vivent en dessous du seuil de pauvreté. En invoquant les atteintes à la famille, on masque ainsi cette réalité‑là pour conserver des positions privilégiées ! (Voir chapitre 4 du présent document).

Tout comme nous l’avons vue au paragraphe 1, le tournant des années 1970 modifie l’approche de la politique familiale.

Pierre Laroque, en personne, lançait dès 1969 dans le rapport du groupe d’études à long terme, sur les problèmes démographiques, constitué dans le cadre de la préparation du Plan, (commission qu’il présidait lui-même), l’idée d’une modulation des prestations familiales en fonction des ressources des familles !

On est en effet dans le cycle économique dénommé les Trente Glorieuses et à nouveau des inégalités se sont fait jour. Verser les allocations à toutes les familles uniformément, c’est donner trop peu à celles qui en ont besoin et trop à celles qui pourraient s’en passer !

De plus, ironie de l’évolution, l’uniformité induite par le système hérité des années 1950 retire « la vertu incitative » des allocations familiales si chère aux natalistes et aux familialistes, du fait de la progression du pouvoir d’achat et de l’entrée massive des femmes sur le marché du travail.

Pierre Laroque sera écouté :

Dès le 23 décembre 1970, l’allocation orphelin, donc spécifique est créée : elle est appelée orphelin pour masquer le fait qu’elle est surtout destinée aux familles monoparentales… et sous conditions de ressources, tout comme celle mise en place pour les mineurs handicapés (loi du 13 juillet 1971 !).

Ces 2 lois représentent si on peut dire, vu du point de vue conservateur, une très grande rupture de l’égalité des prestations par rapport au principe mis en place en 1945, quelles que soient les ressources des familles !

Vu d’un point de vue POLITIQUE, l’Etat cesse d’encourager un modèle familial (femme au foyer et fin de l’opprobre jetée sur les familles monoparentales ; c’est la politique des transferts sociaux en faveur des familles défavorisées qui prend le pas et la prise d’acte de l’entrée massive des femmes sur le marché du travail et dans les universités. (Politique mise en place sous Pompidou et Giscard et il ne semble pas qu’elle ait suscitée la même hargne de la part des familiaux de l’époque, que aujourd’hui !

Le 9 juillet 1976 est créée l’API (Allocation Parent Isolé), puis le complément familial le 12 juillet 1977… sans opposition véritable.

Mais question de fond et paradoxale  pour les familialistes: les femmes mariées ou non, qui travaillent de plus en plus, mais avec des salaires bas (cela n’a pas bougé depuis 45 ans) cotisent comme les hommes aux différentes branches : autrement dit la femme mariée qui ne travaille pas bénéficie en fait de prestations sociales, grâce aux cotisations de celles qui travaillent et sont souvent beaucoup plus pauvres qu’elles ! C’est ainsi en fait que la politique familiale profite aux riches !!! C’est d’ailleurs le cas avec le QF pour les hauts revenus et c’est pourquoi le gouvernement l’an dernier a abaissé substantiellement le plafond pour les hauts revenus.

Incohérent et injuste, le système des aides financières aux familles a besoin d’être complétement remis à plat, telle est la question ouverte dès la fin des années 1970. C’est la raison pour laquelle, lorsque la CNAF lance en 1979 une grande réflexion sur la refonte des aides, compte tenu de la multiplicité des allocations fonctionnant sur des critères différents, le CNAFAL propose pour unifier le tout, la mise en place d’une allocation universelle pour tous, de la naissance à la mort, fiscalisée qu’il dénomme salaire social à l’enfant et au jeune, puis revenu social garanti !

Dès les années 1980, la politique familiale s’infléchit vers une aide à l’enfant, d’autant que de plus en plus de couples vivent en union libre et de plus en plus de naissances ont lieu hors mariage.

L’Etat républicain et laïque s’interdit dès lors de privilégier un type de famille et l’option purement nataliste.

D’où le redéploiement vers les aides indirectes (garde d’enfants, ouverture de la maternelle dès l’âge de 2 ans, conciliation vie familiale, vie professionnelle). Mais aussi, la volonté de Pierre Mauroy, dès 1982, de réduire fortement la progressivité des allocations familiales en fonction du rang de l’enfant et même de verser une allocation dès le 1er enfant, ce qui était dans le programme socialiste.

La crise de 1983 et la démission de Nicole Questiaux, alors Ministre des affaires sociales, stopperont ce projet. Le CNAFAL, en vertu de l’égalité des enfants, quel que soit leur rang, continue à réclamer le versement d’une allocation familiale, dès le premier enfant et la suppression de la demi-part fiscale supplémentaire au 3ème enfant.

3.     Fiscalisation et modulation des allocations familiales : quelle tartufferie !

On l’a vu dès 1970, la « modulation » est en réflexion quels que soient les protagonistes politiques. On l’a constaté, le gouvernement de Pierre Mauroy, s’est attelé à introduire plus de justice sociale dans la politique familiale.

Raymond Barre, dans les années 80 proposait la fiscalisation des allocations familiales. En 1994, le rapport MINC qui était un proche inspirateur de Balladur, devenu Premier Ministre, préconise de les mettre sous condition de ressources !

En 1995, Alain Juppé devenu Premier Ministre, devant le déficit de la Sécurité sociale prévoit un plan d’économie draconien, où 40% des économies sont effectuées sur les politiques familiales et avec toujours la mise sous conditions de ressources des allocations familiales et les soumet à l’impôt. Le Président de l’UNAF de l’époque, Roger Burnel, réagira fermement sur le plan des principes, mais sans la hargne et les discours apocalyptiques auxquels nous assistons depuis plusieurs semaines, de la part de l’UNAF et de la plupart des mouvements familiaux, à l’exception du CNAFAL.

En 1998, Lionel Jospin va s’essayer à la fiscalisation des allocations familiales, qui va se traduire par un échec du fait de la menace de mobilisation des familiaux. Une partie de la presse qualifie ces allocations, « allocation-vison » pour les hauts revenus.

En 2008 et 2010, la Commission Attali réunie à la demande de Nicolas Sarkozy, propose la fiscalisation des allocations familiales.

4.     Quelle est la vraie question qui nous est posée depuis 4 décennies : au sujet de la politique familiale : y-a-t-il de la justice sociale et est-elle discriminante à l’égard des familles les plus pauvres ?

On ne peut invoquer des attaques contre la famille, on ne peut pas invoquer le principe du « on cotise selon ses ressources et l’on reçoit selon ses besoins » (document UNAF, octobre 2014) :

  • Quand le Conseil des prélèvements obligatoires « pointait » que les 10% des foyers les plus aisés captaient en 2011, 46% des baisses d’impôts que le QF générait (6,5 milliards d’euros sur 14 !), tandis que les 50% les moins riches ne bénéficiaient que de 10% de la ristourne !
  • Quand le recours à un mode d’accueil formalisé est réservé aux ménages favorisés : 21% des enfants d’ouvriers contre 73% d’enfants de cadres !
  • Quand le recours à un assistant maternel et à la garde à domicile rémunérée ne concernent que 18% des ménages (les plus favorisés), contre 63% par les parents, pour les ménages les plus modestes.
  • Quand l’avantage par enfant est multiplié par 8 entre un ménage de deux salariés au SMIC et un ménage, dont les deux actifs gagnent 50 000 €.
  • Quand il y a faiblesse des prestations pour les familles avec un enfant, du fait notamment des versements des allocations familiales à partir du 2ème enfant et du complément familial à partir du 3ème enfant.
  • Quand 70% du gain lié au quotient conjugal bénéficie à des couples sans enfants à charge, raison pour laquelle en 1981, François Mitterrand et Pierre Mauroy avaient envisagé sa suppression.
  •  Quand les « droits familiaux de retraite » représentent 6,9 milliards d’euros pour les retraités ayant eu 3 enfants à charge : ne serait-il pas plus judicieux de redéployer tout ou partie de ces sommes vers les familles les plus défavorisées ? (Familles monoparentales, familles nombreuses vivant en dessous du seuil de pauvreté), ou du moins, d’en répartir une bonne moitié. Car ces retraités n’ont plus d’enfants à charge et c’est les jeunes familles qu’il faut aider !

En conclusion, le CNAFAL observe :

  • Que ce qui favorise la natalité, c’est la marche en avant vers l’égalité totale homme/femme et l’investissement dans la conciliation vie familiale/vie professionnelle par l’augmentation et la diversification de l’offre de garde, l’ouverture effective, dès l’âge de 2 ans, des maternelles.

A cet égard, le CNAFAL estime que la mesure qui consiste à augmenter l’aide à l’investissement pour les crèches en faisant passer la subvention de 8 800 € par place, à 11 000 € est une bonne nouvelle.

  • De même, on n’a pas à lancer des anathèmes et crier à l’apocalypse quand on va enlever 65 € à des familles disposant de 6 000 € par mois et 2 enfants ; ou bien en retirant 84 € par mois pour une famille de deux enfants dont les revenus sont supérieurs à 8 000 € par mois.

Le niveau de vie médian mensuel par personne, après impôts et prestations sociales toutes catégories professionnelles confondues, se situe à 1 630 € !

  • Aujourd’hui, ce sont 12% des familles qui seront touchées par la modulation. C’est bien ce qu’ont compris les français et les françaises qui trouvent normal (74%), cet effort proportionnel aux revenus des familles.
  • Autrement dit, les cris d’orfraie des familialistes résonnent plus comme un cri corporatiste et d’égoïsme de classe, ce que le CNAFAL avait déjà dénoncé au printemps 2013.

En revanche, le CNAFAL appelle le gouvernement à une lutte accrue contre la fraude sociale des employeurs, qui se situe entre 20 à 25 milliards d’euros, selon le dernier rapport de la Cour des comptes et qui inclut, bien sûr, la cotisation sociale famille due par l’employeur (5,35%) du salaire brut du salarié.

Le CNAFAL

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