Un point fondamental concerne la centralisation excessive des données sensibles. La réunion de ces deux cartes produirait un outil de collecte de données particulièrement détaillé sur les individus. De là à craindre une dérive vers une forme de surveillance générale, il n’y a qu’un pas que certains n’hésitent pas à franchir.
En outre, la justification principale pour cette fusion – la lutte contre la fraude sociale – semble pour le moins discutable. En effet, si la fraude existe, plusieurs études indiquent qu’elle reste un épiphénomène. Elle ne justifierait pas, à elle seule, la mise en place d’un tel dispositif, potentiellement coûteux et risqué en termes de protection des données.
Il convient aussi de s’interroger sur l’efficacité réelle d’une telle mesure. Les rares fraudeurs importants sont souvent en avance sur les dispositifs de contrôle et il y a fort à parier que cette fusion n’entravera que marginalement leur activité.
La sécurité Sociale se félicite de cette fusion et elle espère faire des économies substantielles en n’éditant plus de carte vitale. Cela signifie que ce sont les mairies qui agiront. Or connaissant les délais importants d’obtention d’une carte d’identité nous sommes inquiets de cette contraction. Il est fort probable que des délais supplémentaires seront nécessaires, ceux-ci impacteront le droit des citoyens et des assurés, l’accès à la santé déjà mis à mal, sera encore plus difficile.
Enfin, le Conseil National des Associations Familiales Laïques (CNAFAL), souvent en pointe dans les débats sur les questions de solidarité et de justice sociale, ne voit pas d’un bon œil cette fusion. Pour le CNAFAL, la fraude sociale est bien moins préoccupante que les non-recours aux droits sociaux, ces situations où des personnes n’usent pas des aides auxquelles elles ont pourtant droit. De là à penser qu’une telle mesure pourrait encore plus décourager ces personnes, il n’y a qu’un pas et cette mesure ne paraît pas être une réponse adéquate aux véritables enjeux de notre système de protection sociale.
Julien Léonard,
Président.
Marie-Odile Pellé-Printanier,
Vice-Présidente.