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L’Egalité est une norme de droit, une règle juridique qui organise l’ensemble des rapports au sein de notre société. Loin d’être un mythe, c’est un principe inscrit au sommet de notre Constitution. Elle est étroitement liée à la laïcité.
Egalité et laïcité sont étroitement liées et même indissociables
L’égalité, qui traverse la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, associée à la liberté et à la fraternité dans la devise de la République, est au fondement de l’idéologie républicaine. Elle se traduit dans toutes les sphères du droit. L’égalité portée à l’article premier de la Constitution impose que seuls les individus soient titulaires de droits, car reconnaitre des droits à des groupes pourrait rompre l’égalité entre les citoyens selon qu’ils appartiennent ou non à tel groupe, comme le constitutionaliste Guy Carcassonne le relève.
La laïcité est la traduction des nécessités qu’entrainent dans les rapports entre les citoyens, la société et l’Etat, l’égalité. C’est l’égalité d’exercice des droits de chacun et de traitement devant la loi qui implique que, pour qu’elle soit effective, elle se fasse en dehors de tout encadrement de la société par une Eglise, ou l’intervention de tout autre particularisme organisé entre le citoyen et ses droits.
Un principe d’égalité très différent du principe anglo-saxon de la « non-discrimination », qui encourage l’expression des différences. Ce principe renvoie à une autre forme de société, précisément divisée en groupes discriminés à partir de la religion, de la couleur, de l’origine. C’est cette logique qui induit les accommodements dits raisonnables qui n’en ont que le nom pour que le droit à la différence confine à la différence de droits. Elle encourage une organisation divisée de la société, qui divise les forces sociales, rendues incapables de jouer leur rôle. La lutte contre les discriminations doit rester fondée sur le principe d’égalité, au regard tout d’abord d’une société de citoyens aux droits interchangeables.
Retour sur nos institutions pour mieux comprendre les enjeux de la laïcité
La Constitution de la Ve République de 1958 précise dans son article premier, à côté du principe d’égalité, que « La France est une République indivisible, laïque, démocratique et sociale ». Indivisible : Une même loi pour tous sur l’ensemble du territoire ou encore, tel que se définit l’Etat-unitaire : Une loi-Un territoire-Un peuple. Laïque -La séparation du politique et du religieux garantit la souveraineté du peuple émancipé de l’influence de l’Eglise, liberté de croire ou de ne pas croire. C’est aussi la garantie de la liberté d’exercer son culte pour chaque individu. Démocratique : Concrétisation d’une vision des hommes agents de leur histoire, se gouvernant eux-mêmes. Le gouvernement du peuple, pour le peuple par le peuple. Sociale : Des droits sociaux embrassant l’ensemble des membres de notre société à travers une protection sociale et un droit du travail unique au monde. L’Etat providence en est comme le symbole, qui n’a de providentiel que le nom au regard des révolutions et des mouvements sociaux qui ont été à l’origine de son envol.
On peut voir là que la laïcité, contrairement à ce que certains affirment, est bien présente dans notre droit, énoncée parmi les attributs de la République sur sa plus haute marche.
Définir la laïcité en lien avec l’histoire
La laïcité, c’est l’idée que l’on fait société à partir de ce que l’on met en commun car aucune société ne saurait être une simple addition de différences. La laïcité, c’est l’affirmation que ce qui nous fait égaux, la loi, la politique, la démocratie, la Nation, la République, sont au-dessus de ce qui nous différencie, les religions, les origines diverses, les cultures régionales, sans pour autant les mépriser, bien au contraire.
La laïcité n’est pas une conviction à côté des autres, c’est son principe qui les autorise toutes. L’égalité des droits de l’individu portée au-dessus des différences les protège toutes contre l’hégémonie de l’une d’entres-elles sur les autres. La laïcité permet ainsi aux différences de coexister pacifiquement en facilitant le mélange. Elle permet une forme unique de vivre ensemble qui a évité les séparations sur une base ethnico-religieuse. C’est la laïcité qui réalise les conditions que le peuple puisse se penser comme une entité à mettre l’accent sur ce qui unit les hommes plutôt que sur ce qui les différencie, les divise, donnant son sens à la notion d’intérêt général, au bien public, à la démocratie.
La laïcité est une de ces spécificités françaises en droit fil de la Révolution de 1789 et de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen. Dans la France en 1789, l’individu n’existe pas. C’est une société d’ordres, aux mille divisions, les individus étant soumis à l’arbitraire des puissants. Le roi est le père de ses sujets, il tient son pouvoir directement de Dieu. Avec la Révolution française, c’est cet ordre qui s’effondre brisant le lien indéfectible entre le trône et l’autel. Ce qui triomphe alors avec l’avènement du peuple, ce sont des principes d’organisation politiques fondés non sur la tradition, la religion, mais sur la raison. La France passe d’être gouvernée par un roi à l’être par la souveraineté populaire, la volonté générale.
L’Etat républicain doit alors être l’expression et le garant d’une société de citoyens, censés êtres autonomes à l’égard de tout « corps intermédiaire » par excellence, de l’institution religieuse. Pour autant il n’est pas question d’interdire les religions : l’article 10 de la Déclaration des Droits de l’homme et du citoyen dit que « Nul ne doit être inquiété pour ses opinions même religieuses »
Une lente mais sûre laïcisation de la société
En 1792, c’est la remise des registres de l’Etat civil aux communes, tenus jusqu’alors par les églises. Le Code civil dit Code Napoléon (1804), est expurgé de toute référence religieuse. En 1882 nait l’école de Jules Ferry. Elle est gratuite, neutre religieusement et obligatoire jusqu’à l’âge de 13 ans, une révolution pour les conditions de l’enfance ouvrière. La loi du 9 décembre 1905 de séparation des Eglises et de l’Etat demeure le pilier de la République : Article 1 : La République assure la liberté de conscience. Elle garantit le libre exercice des cultes. Article 2 : La République ne reconnaît, ne salarie ni ne subventionne aucun culte. » Cette loi, autrement dit, c’est la reconnaissance et la garantie de la liberté de croire ou de ne pas croire (art.1), c’est la projection dans le droit privé des cultes, c’est en même temps la définition d’une séparation stricte entre le politique et le religieux (art.2).
La loi du 15 mars 2004 est venue renforcer cette séparation, en la réaffirmant dans l’école de la République, par l’interdiction du port de tout signe ou tenue par lesquels les élèves manifestent ostensiblement une appartenance religieuse. La France est l’un des rares pays où les hommes vivent ensemble sans être séparés par culture ou religion tout en étant garantis par la loi contre toute discrimination, sans conflits majeurs, sans guerre civile.
Conclusion
On peut voir comment la place que s’est donné le peuple a conditionné en France l’émergence d’institutions au cœur desquelles se trouve le principe d’égalité, dont découlent un Etat et une société laïques. Il y a là les ingrédients d’un modèle de société humaniste de grande portée historique dont l’universalisme ne vaut que pour l’idéal de bonheur qu’il propose, entre l’idée d’égalité entre tous et de lutte contre les injustices sociales qui est la marque de notre histoire contemporaine.
Congrès du CNAFAL, Pau, les 15 et 16 juin 2013.
Conférencier : Guylain Chevrier
Docteur en histoire et chargé d’enseignement à Paris 13 Université. Formateur en travail social et consultant. Membre de la mission laïcité du Haut conseil à l’intégration (2010-2013)
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