Familles Laïques

Jean-Marie Bonnemayre est Président du CNAFAL depuis 2005, administrateur à l’UNAF  et engagé dans le mouvement familial depuis 1979.

Un domaine qu’il connaît donc bien et dont il a suivi l’évolution. « Je fais partie de ceux qui n’ont pas été surpris de l’apparition  de la Manif pour Tous. Le 8 juillet 2012, je me trouvais dans le bureau de Dominique Bertinotti et je l’avais mise en garde sur le fait qu’elle aurait des gens dans la rue. Ce qui me permettait de le lui dire, c’est que j’ai vu monter à l’UNAF la vague des catholiques intégristes  à partir de 2008-2009, en entendant certains administrateurs dire que la famille du temps de l’ancien régime c’était mieux. Jamais on n’avait entendu ça en 40 ans, même dans les moments les plus difficiles comme lors de la loi sur l’avortement ou sur les cours d’éducation à la sexualité».

Il se souvient également du retour de vieilles revendications lors d’une conférence de Piketty sur les allocations, « dans la salle les catholiques radicaux demandaient  la mise en place d’un salaire maternel reprenant ainsi un des vieux oripeaux de l’idéologie  familialiste que Vichy n’a pas eu le temps de mettre en place. En nous expliquant que le rajeunissement de la délinquance juvénile ou encore le décrochage scolaire étaient  dûs au  fait que la  femme avait le malheur de travailler. Tout ceci était des signes avant-coureurs de ce qui allait se passer en 2012/2013.

Pour Jean-Marie Bonnemayre la libération de ces discours prend ses racines notamment dans les discours de campagnes de Sarkozy dès 2007. « Il y a fait des critiques de Mai 68 qui n’étaient pas anodines. Mai 68 a été un mouvement emblématique de la libération de la femme, des revendications des homosexuels et de la jeunesse. Le discours de Sarkozy était destiné à se mettre dans la poche cet électorat traditionnel de la droite avec des discours significatifs tels que celui de Latran dans lequel il place le curé au-dessus de l’Instituteur pour flatter les catholiques ou celui de Dakar sur l’homme blanc civilisé et l’africain qui n’est pas encore entré dans l’histoire tout comme le débat sur l’identité nationale pour un autre électorat. Un discours qui ravage la République car elle va à l’encontre de tous les fondamentaux.  Ça amène  des relents vichystes.  On  a dans ces discours tous les ingrédients  pour le retour de la vieille droite catholique, vichyste et maurassienne qui a toujours haï autant de Gaulle que la gauche, celle-là même qu’il avait mis par deux fois sous le boisseau et qui a toujours été factieuse contre la République depuis le 19éme siècle. Celle qui n’a jamais  vraiment  accepté  la  République, la déclaration des droits de l’homme  et  du  citoyen.   Ce  qui, compte pour cet électorat ce n’est pas l’homme ou la femme mais la famille comme brique de base de la société.  Elle est  donc  contre  les droits de l’homme et à plus forte raison contre le mariage pour tous».

Une certaine droite qui peut compter sur des appuis importants dans la presse, «avec  Valeurs Actuelles » qui tire à 100 000 exemplaires et a quasiment remplacé Minute avec toutes les semaines feu sur tous les Républicains, apologie de la famille, immigration zéro et le Djihad à nos portes.  Même Juppé  y passe pour le candidat des bobos. N’oublions pas que les critiques  sur  Najaf Vallaud­ Belkacem viennent d’eux. Le succès de librairie de Zemmour vient de là. Il pleure sur la mort du père, cela me rappelle mai 68 où l’on nous expliquait qu’il s’agissait de la révolte contre le père. Tous les ingrédients y sont. Si tout va à vau-l’eau c’est  que la société se féminise… Tous ces petits filets d’eau   additionnés convergent vers l’extrême  droite, même si je ne les mélange pas avec Marine Le Pen. Ils ne sont en effet pas sur le même registre et pas non plus sur le même électorat étant plus sur la classe moyenne et l’ancienne aristocratie alors que le FN est sur un électorat plus populaire qu’elle siphonne à la gauche».

Face à cette  menace, Jean-Marie Bonnemayre déplore que la gauche ne mène pas la bataille sur le fond des idées, « sur les valeurs de la République, la liberté, l’égalité et fraternité, le solidarisme inventé par Léon Bourgeois dans un contexte ou le pays va mal. La 3ème République est morte en 24 heures, la 4ème en une semaine. Tous les 40 à 50 ans, il y a un pas vers l’extrême droite avant de revenir à gauche. La République est ravagée par le libéralisme,  il n y a plus de ressorts, les gens n’arrivent plus à se défendre. Tout y est pour que les français se tournent vers les extrêmes. Il va falloir être pédagogue pour expliquer la situation dans laquelle nous sommes depuis une dizaine années. Ne comptons pas sur les politiques sur le faire. Ils traversent une crise de crédibilité et d’efficacité avec deux cohabitations et trois fausses alternances.  De grands élus qui vivent dans une bulle, c’est  une aubaine pour les extrêmes ! Il est incontestable qu’il va falloir faire une réforme institutionnelle pour qu’une nouvelle génération  politique émerge. Il faut interdire le cumul des mandats dans le nombre mais aussi dans la durée. Après 10 à 12 ans d’un mandat, il faut passer à autre chose. Il faut une démocratie participative qui ne soit pas une mascarade ».

I’AFL  24   renseigne  les   usagers  sur  la consommation, le  surendettement, la  défense des  familles etc… Le mercredi après-midi  dons  les locaux de  l’UDAF de 14 h à 17 h et à la maison des associations le mardi de 14 h à 17 h

Philippe Jolivet

Article de L’ECHO  à retrouver ici