Après Charlie, les enfants doivent-ils être en première ligne ?

Un élève de CE2, âgé de 8 ans sommé de s’expliquer parce qu’il  a  refusé la minute de silence aux morts de Charlie et aurait
déclaré « je ne suis pas Charlie, je suis avec les terroristes ». Audition au commissariat, emballement médiatique, mises en
accusation ; qu’en est-il de la protection de l’enfance ?   Les mineurs bénéficient d’une présomption d’irresponsabilité  !  En principe,  un  éducateur,  un  juge,  un  policier  doivent  s’assurer,  de  la  capacité  de  l’enfant  à  comprendre  la  portée  de  ses
actes, surtout lorsque celui-ci  a moins de 13 ans. Mais est-il anodin que cela se passe à Nice, ville où certains édiles voyaient,
dès le dernier trimestre 2014, le Jihad islamique à leurs portes… !  Cela mérite des éclaircissements préalables.  Bis repetita à
Villers Côterets où un garçon de 9 ans a été entendu par la gendarmerie.
Y-a-t-il  eu  des explications pédagogiques suffisantes avec la minute de silence ?  Y-a-t-il eu dialogue ? Pourquoi ne pas avoir
discuté au préalable avec les parents ?
Il est peut-être temps que, dès le primaire, dans toutes les classes, une véritable instruction morale et civique soit dispensée.
Les enfants ont droit à une  véritable éducation laïque en continu, c’est-à-dire dégagée des préjugés quels qu’ils soient,  des
déterminismes  qui  traversent  la  société.  Les  enfants  doivent  être  familiarisés  avec  les  grands  mouvements  d’idées  qui
traversent  l’humanité.  Il  faut  affirmer  que  la  liberté  de  penser,  de  s’exprimer,  permet  de  construire  sa  personnalité.
L’Éducation nationale, dans son cadre laïque, doit développer une culture  du  respect de l’autre, du débat, de l’esprit critique
argumenté, de l’exercice de la raison avec la distance nécessaire par rapport aux médias, qui  souvent jouent sur le registre
de l’émotionnel, de l’événementiel, de l’immédiateté. C’est l’école qui doit amener le fond, les valeurs qui sont celles de la
République. Depuis 25 ans, cette mission de la République a été peu à peu délaissée. Le CNAFAL n’en n’a jamais fait son deuil
par-delà les déclarations d’intention des uns et  des autres.  Il est  temps de passer à  l’acte !  Il  y a un lien organique entre
l’école et la laïcité. La laïcité ne doit pas être instrumentalisée pour défendre l’identité des français de souche.  La laïcité ne
peut être invoquée uniquement pour refuser l’Islam, alors que l’Etat républicain n’a cessé de s’accommoder du christianisme,
au point de céder du terrain depuis 30 ans. La vraie question est que l’école ne remplit plus sa promesse sociale.
Le grand éducateur d’enfants, Fernand Deligny, disait il y a 40 ans : « Une nation qui tolère les quartiers de taudis, les classes
surpeuplées, et qui ose châtier les jeunes délinquants, me fait penser à cette vieille ivrognesse qui vomissait sur ses gosse s à
longueur de semaine et giflait le plus petit, par hasard, un dimanche, parce qu’il avait bavé sur son tablier.  »
Il n’est pas question de développer une culture de l’excuse, mais de regarder lucidement les causes profondes de la dérive
actuelle de notre pays.
Jean-Marie Bonnemayre,  Président

Jean-François Chalot,   Secrétaire général,

Partager cet article